Francos de Montréal 2022 - Jour 4 : Lysandre, MIELS, Marilyne Léonard et Emile Bilodeau


14 juin 2022

Francos de Montréal jour 4 ! Nos petits yeux deviennent fatigués mais la musique nous porte, au rythme des découvertes nous retrouvons de l’énergie. Retour sur une quatrième journée sous le signe de l’union, de la communion et de l’excellente musique (une fois de plus).

Lysandre

Annoncée Révélation Radio-Canada la veille, on ne pouvait passer à côté du concert de Lysandre pour ouvrir cette quatrième journée. On s’attendait à un concert doux et planant à la lumière de son premier album Sans oublier paru en mars dernier. Nous n’avons pas été déçues. C’est entourée de Marie Claudel (guitare), Etienne Dupré (basse) et Samuel Gougoux (batterie), que Lysandre se présente à nous, son piano toujours à porter de doigts. 

L’artiste est euphorique d’être là, une joie communicative qui illumine le moment. Durant 60 minutes cette virtuose du piano nous offre des moments musicaux de grâce déposés sans prétention par ci, par là. Avec La Roseraie, elle nous propose un moment aérien qui lui permet de vocaliser en se fondant dans l’orchestration de la chanson. 
Lysandre nous parlera aussi mythe et littérature avec Tintagel référence à l’œuvre médiéval Tristan et Iseut et véritable hymne aux femmes. 

Enfin, avec La pointe du monde, Lysandre nous emmène vers un morceau dont le texte prend réellement de l’ampleur en live et se révèle d’une belle profondeur.

MIELS

MIELS nous avait déjà interpellé sur disque mais alors en live… Mes aïeux, ça décoiffe ! Et on aime ça ! 
Ce duo 100% Rock’n’Roll nous offre une prestation digne des meilleurs band américains mais en français s’il vous plait ! Dès la première chanson ça lève malade, on sent battre dans notre poitrine le cœur de la route qui les a mené jusqu’à l’aboutissement de ce projet. 

Chez MIELS tout est assumé, les guitares saturées, les images de road trip et l’envie de traduire leur musique dans une langue qui est rarement le premier choix des rockeur.euse.s. C’est tellement bon, ça fait tellement de bien !

On regrettera qu’ils n’aient pas été programmés sur la scène Sirius XM ce qui aurait sans doute permis à ce son électrique de se déployer comme il se doit. 

Au vu du monde, de plus en plus présent durant la prestation, l’appel du son fut néanmoins plus fort que la place où ils se trouvaient et on leur souhaite que cela continue comme cela.

 

Marilyne Léonard

De ce que l’on savait de Marilyne Léonard avant le concert, on s’attendait à une prestation pop, influencée par des sons hip-hop. Il y avait de ça, mais il y avait bien plus. La chanteuse en full band était programmée à 19h sur la scène Bell (la plus grande du festival). Ça en disait long sur le potentiel du show. 

Nous n’avons pas été déçues. Arrangements et costumes travaillés, la chanteuse apparait dans une combi ultra swagg, éclats de peintures façon Jackson Pollock. Elle enchaine les titres tantôt influences reggae, tantôt indie en passant par des incursions de sax qui amène de petites touches de jazz.

L’artiste dont le premier album Vie d’ange est l’un des plus prometteur de l’année terminera une excellente prestation sur une reprise guitare en main de Baby One More Time (Britney Spears) emblème s’il en est de la pop culture avant de tirer sa révérence avec Bateaux, premier single de ce prodige qui, on l’espère, continuera « d’écrire des chansons parce qu’elle ne sait pas parler.»

Emile Bilodeau

Emile Bilodeau c’est l’histoire d’un gars qui représente à lui tout seul le Québec moderne, le Québec ancien, la volonté farouche de mixer les cultures, les histoires et les humains. 

D’emblée l’artiste met le feu avec J’en ai plein mon cass chanté à tue-tête par un parterre plein à craquer, le ton était donné, la nuit ne faisait que commencer ! Il enchaine les tubes de façon explosive. Le chanteur sait allier les sons blues et folk comme personne, prêt à tremper son t-shirt au milieu d’un full band avec cuivres qui a su sublimer son œuvre. Grand défenseur de la langue française, Emile Bilodeau déplore l’anglicisation de la société et les dérives du monde capitaliste. 

Ce concert était aussi l’occasion pour Emile Bilodeau de mettre en lumière un sujet qui lui tient à cœur la culture et la musique des peuples des premières nations. Il dédiera d’ailleurs le spectacle à Joyce Echaquan, jeune femme atikamekw décédée en 2020 dans un hôpital de Joliette, après avoir été victime de racisme durant la durée de ses soins. 

Tombé amoureux de la communauté Uashat Mak Maliotenam, le chanteur porte un message trop souvent oublié de l’histoire des Amériques et quasiment inconnu en Europe. Pour l’occasion, il s’était donc entouré d’artistes Innu : Scott Pen Picard, le groupe Maten (avec qui il collabore sur son dernier titre Tshe minupunanu), Laura Niquay et Elisapie. 

Au-delà de la langue française l’artiste défend donc la culture québécoise au sens large incluant dans celle-ci le peuple des premières nations si chères à son cœur comme pour ne plus jamais oublier que l’histoire enseignée avec justesse et justice rend les humains plus grands, plus beaux et plus unis. Cet unisson qui au Québec « fait d’la christie d’bonne musique ». 

Emile Bilodeau infatigable, d’une générosité qu’on a rarement vu, nous démontre à de nombreuses reprises ses qualités d’interprète sur des titres comme La jungle du capital ou Ça va. Une reprise en chœur de la foule de ce dernier titre qu’on entendait probablement jusqu’au-dessus du Mont Royal. Une émulation tellement forte que le chanteur revient une dernière fois, malgré l’heure tardive, pour Je me souviens, décriant une dernière fois les divisions qui existent de par le monde. Émile Bilodeau dresse des ponts et cela ne laisse personne indiffèrent.

En quittant la scène Bell peu après 22h30, nous nous sentions incroyablement en communion avec un pays que nous avons redécouvert le temps d’une soirée.

Rédation : Caroline Dirix
Crédits photos : Aurore Davignon